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DE GAULLE – CHIRAC ET L’IRAK
Une Grande Amitié ?|
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5 out 2005

L’Institut canadien de recherches sur le Judaïsme
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Numéro 63 - Vendredi, 17 janvier, 2003

Ce que la France voit en l'Irak
Par Michel Gurfinkiel

The Weekly Standard, 28 octobre 2002  
The Weekly Standard, Washington DC, 28/10/2002
Traduction Pinhas Konopnicki pour CID-DémocratieMoyenOrient

L'histoire d'amour de la France moderne avec l'Irak a été passagèrement annoncée en l'année 803, lorsque Harun Al-Rashid, légendaire Calife Abbasside de Bagdad, envoya une ambassade au tout aussi célèbre Empereur Charlemagne, Roi des Francs.

Débuts prometteurs : les cadeaux du Calife à l'Empereur incluaient des épées damascènes incassables, une clepsydre, et un éléphant. Néanmoins, de nombreux siècles allaient s'écouler avant que les deux pays ne soient en contact régulier. Entre temps, les envahisseurs mongols du 13ème siècle avaient brûlé les villes antiques de l'Irak, dévasté le système d'irrigation le long du Tigre et de l'Euphrate, et passé 90 pour cent de sa population au fil de l'épée. Même vers la fin du 19ème et le début du 20ème siècle, alors que les Français étaient présents dans beaucoup de pays arabes -- le Maghreb, l'Egypte, la Syrie, et Liban -- ils étaient restés hors d'Irak, à l'époque province ottomane et domaine réservé des Allemands jusqu'en 1917, quand elle tomba entre les mains des Anglais comme monarchie Hashemite nominalement indépendante. Il a fallut attendre la révolution républicaine irakienne de 1958, le coup d'état le plus brutal et le plus sanglant jamais mené dans un pays arabe, pour que la relation change. L'Union Soviétique avait remplacé la Grande-Bretagne comme puissance étrangère la plus influente à Bagdad, et la France arrivait juste derrière elle.

Deux hommes veillèrent à se rapprochement. Le premier était le Président Charles De Gaulle. Chef de la résistance pendant la deuxième guerre mondiale, le Général De Gaulle avait fait un retour politique en 1958 et avait instauré la cinquième République, consacrée à la renaissance de la France comme grande puissance. Cela entraînait la modernisation de l'économie domestique et la remise en question de la division du monde d'après-guerre entre les superpuissances, les Etats-Unis et l'Union Soviétique -- en particulier, en défiant les Etats-Unis comme puissance occidentale suprême.

Une manière de promouvoir ces deux objectifs simultanément était de soutenir le nationalisme du tiers monde. En moins de quatre ans, De Gaulle transforma le vieil Empire colonial en Afrique en une constellation lâche d'états-clients, rendant de nouveaux liens possibles avec d'autres pays, notamment dans le monde arabe. À un membre conservateur de l'Assemblée Nationale qui déplorait la restitution du Sahara riche en pétrole à l'Algérie indépendante en 1962, De Gaulle répliqua : "Ne voyez-vous pas que nous avons échangé l'Empire de grand-papa contre l'Empire bien plus large du futur, et le pétrole limité du Sahara contre le pétrole beaucoup plus abondant d'Arabie?"

Il y avait de la logique dans tout cela, sauf que les plus riches des pays pétroliers arabes ou islamiques -- de la Libye à l'Arabie Saoudite et l'Iran, tous des monarchies -- restaient sous influence anglo-saxonne. L'Irak, cependant, semblait représenter une occasion. Le régime révolutionnaire avait commencé à exproprier les avoirs de l'ancienne compagnie pétrolière coloniale, l'Iraq Petroleum Company, largement anglo-américaine. L'Irak pouvait-il être introduit dans l'orbite française ? De Gaulle était persuadé que même les Américains n'objecteraient pas, tout désireux qu'ils étaient d'empêcher la prise de contrôle soviétique. Mais qui était alors leader à Bagdad ? Le nouveau régime était gangrené par les coups d'états et les intrigues. Kassem, le premier chef républicain, avait été renversé et mis à mort en 1963. Il y eut une succession d'autres chefs nationalistes, tantôt nassériens tantôt tenants du très dogmatique parti Baath -- mais pas de leadership fort et stable souhaité par la France pour établir une relation durable.

L'homme qui vint en aide à De Gaulle dans cette conjoncture fut l'historien et expert militaire Jacques Benoist-Méchin. Intermédiaire des plus improbable, Benoist-Méchin était en apparence l'opposé de De Gaulle. Pendant la deuxième guerre mondiale, il ne s'était pas simplement rangé du côté du régime de Vichy du Maréchal Philippe Pétain contre la France libre de De Gaulle, mais avait explicitement soutenu le nouvel ordre Hitlérien en Europe. Il rapportait même dans ses "mémoires" qu'il avait mis en garde Hitler, au cours d'une entrevue à Berlin en 1942, au sujet de certaines de ses décisions stratégiques; et ajoutait en commentaire que le Führer n'avait "malheureusement" pas observé son conseil. De Gaulle, cependant, n'était pas homme à classer les gens selon des critères conventionnels. Surtout, il admirait la grande "Histoire de l'Armée  allemande depuis l'Armistice" de Benoist-Méchin, publiée pour la première fois en 1938, qui expliquait comment la Reichswehr, l'armée-croupion de la République de Weimar, avait été transformée en corps d'élite préparant le terrain pour  la Wehrmacht de Hitler. En fait, le premier ordre de De Gaulle, en prenant les rennes du ministère de la guerre en tant que chef du Gouvernement de Libération Nationale de la France en 1944, avait été de réimprimer le livre et de le distribuer aux officiers de l'armée française ressuscitée. Quant à son auteur, De Gaulle ne pouvait lui épargner toute mesure de punition, mais s'assura qu'il y survive. Benoist-Méchin fut condamné à mort pour trahison par la Haute Cour de Justice de France en juin 1947, pour être presque immédiatement gracié et renvoyé à ses études.

Benoist-Méchin devint un aussi grand défenseur des politiques anti-anglo-saxonne de De Gaulle qu'il l'avait été de celles de Pétain. Et il connaissait le Moyen-Orient presque aussi bien qu'il connaissait l'Allemagne. Il avait écrit les premières -- et à ce jour, les meilleures -- biographies de Mustafa Kemal et d'Ibn Saud jamais édité en français, et était un confident de la plupart des chefs arabes, du Roi Hassan II du Maroc à Nasser. Mais ses liens avec l'Irak étaient encore plus forts. En septembre 1941, alors qu'il était bras droit du vice-président du gouvernement de Vichy, il avait conçu un accord bilatéral permettant à l'Allemagne de livrer des armes par le territoire syrien alors sous contrôle français à Rashid Ali, le chef irakien allié de l'Axe qui venait juste de renverser le régent pro-Britannique, Abdullilah, et son premier ministre, Nuri Saïd. Les livraisons allemandes d'armes ne se concrétisèrent jamais, car un mois plus tard, la France libre reprenait la Syrie à la France de Vichy, et les Anglais rétablissaient le récent en Irak. Mais les hommes de Rashid Ali n'oublièrent jamais à quel point Benoist-Méchin s'était préparé à se rendre utile. Bon nombre d'entre eux avaient été écartés, mais ceux qui étaient
parvenus à rester dans les forces armées irakiennes étaient partie prenante de la révolution de 1958. Ils ne tardèrent pas à contacter leur vieil ami, qui à son tour les présenta aux personnes compétentes au Quai d'Orsay, le Ministère des Affaires Etrangères français. C'est alors que De Gaulle convoqua Benoist-Méchin lui-même au palais de l'Elysée. "L'Irak est  réellement la clef de votre politique arabe," aurait dit l'ancien fonctionnaire de Vichy au président. "Ses réserves de pétrole ne sont dépassées que par celle d'Arabie Saoudite. Et les personnes les plus dignes de confiance en Irak sont les Baathistes."

DE GAULLE démissionna en 1969, peu de temps après que Saddam Hussein, le plus intelligent et le plus impitoyable de tout les Baathistes, arrivait au pouvoir. Saddam allait apporter à son pays la stabilité, quoique par des moyens totalitaires. Et il avait une tendresse particulière pour la France. Son oncle et père de remplacement, Khairallah Tulfah, avaient été impliqué dans le coup d'état de Rashid Ali. Les contacts lancés par Benoist-Méchin ont par la suite mené à de véritables accords négociés sous le successeur de De Gaulle, Georges Pompidou. Il incomba à Jacques Chirac -- un des collaborateurs les  plus appréciés de Pompidou et ministre jusqu'en  1974 ; puis, sous le successeur de Pompidou, Valéry Giscard d'Estaing, en tant que premier ministre de France de 1974 à 1976 -- de formaliser ces accords en traités et contrats.

Naturellement, il serait absurde d'affirmer que la France Gaulliste a armé l'Irak délibérément, ou qu'elle l'a équipé en armes de destruction de masse. La France poursuivait simplement ses intérêts nationaux. Une fois que les Irakiens eurent promis qu'ils ne construiraient pas d'armes nucléaires, il n'appartenait pas à Paris de déterminer si oui ou non ils prenaient  secrètement des mesures visant à transformer le réacteur nucléaire civil Osirak en une installation militaire. Les gouvernements français antérieurs n'avaient pas été tatillons au sujet de la façon dont les Israéliens utilisaient leur réacteur de fabrication française à Dimona, dans le désert du Néguev. Et les mêmes gouvernements Gaullistes ou post-Gaullistes qui étaient en pourparlers avec l'Irak de Saddam Hussein étaient engagés dans des pourparlers et accords parallèles, également à propos d'installations nucléaires, avec l'Iran du Shah, rival de l'Irak pour l'hégémonie dans le golfe Persique. Quant à Chirac lui-même, il ne fut pas responsable de la mesure la plus lourde de conséquence prise par la France concernant l'Irak en matière de nucléaires : la décision pour fournir à l'Irak du plutonium enrichi. Cette décision a été prise par son successeur au poste de premier ministre, Raymond Barre. En fin de compte, une seule des six livraisons prévues fut effectuée.

En 1981, les Israéliens se sentirent suffisamment menacés par l'Irak pour détruire le réacteur Osirak dans un des raids aériens les plus audacieux de l'histoire. A cette époque, le Shah avait été remplacé par la République islamique d'Iran de l'Ayatollah Khomeini, et Saddam Hussein avait envahi ce nouveau voisin. Les Français, qui venaient juste d'élire un président socialiste, François Mitterrand, pour la première fois en 27 ans, se demandaient s'ils devaient maintenir leur relation avec l'Irak. Une raison d'y mettre un terme était que Saddam était un mauvais payeur.

 

La plupart des compagnies françaises en affaire avec l'Irak étaient en réalité payées par Coface, l'organisme gouvernemental français qui soutient les contrats d'exportation. Néanmoins, restait la perspective que l'Irak puisse gagner la guerre contre l'Iran et, avec ses énormes ressources pétrolières, devienne la puissance dominante du Moyen-Orient. De plus, la solidarité avec Bagdad, cimentée par l'intense coopération et les contrats commerciaux des années 70, était devenue très populaire dans le public français. Les Gaullistes la considéraient comme un élément de la sacro-sainte "politique arabe de la France," un legs du général, aussi bien qu'un accomplissement personnel de Chirac.

Les communistes, force politique toujours significative dans les années 80, soutenaient un régime irakien généralement pro-Soviétique. La gauche anti-américaine, une force montante dans le parti socialiste, voyait Saddam comme un "leader anti-impérialiste" et même comme un "rempart séculariste" contre le fondamentalisme Shiite.

L'église catholique avait eu ses propres contacts avec Tariq Aziz, ministre chrétien des affaires étrangères de Saddam Hussein. Les antisémites et les antisionistes de tout poils, y compris les loyalistes jusqu'au dernier jour de Vichy, étaient enthousiastes, aussi. Mitterrand finalement accepta de reprendre et même d'élever la coopération française avec l'Irak, fournissant des armes et créant des partenariats industriels.

En 1989, quand Saddam Hussein eu finalement défait Khomeini, pour environ 10 milliards de dollars d'armes françaises avaient été fournies à l'Irak, desquels moins de 5 milliards de dollars avaient été payés. Et environ la moitié de toute la production d'armes française provenait des commandes liées à l'Irak.

L'invasion du Koweït par Saddam un an plus tard ranima le débat. L’Irak devait-il être combattu -- ou soutenu ? Une partie significative de l'opinion française, de la gauche dure à l'extrême-droite, pris position au côté de l'Irak. Son champion, le ministre socialiste de la défense, Jean-Pierre Chevènement, préféra démissionner du cabinet plutôt que de cautionner l'intervention militaire.

Une part plus grande encore du public était encline à la neutralité. Mitterrand a cependant rejoint la coalition internationale menée par les Américains pour la libération du Koweït (non sans avoir tenté des négociations de dernière minute avec Bagdad), ainsi que la plus petite coalition qui plus tard expulsa l'armée de l'air irakienne du Kurdistan et du Sud de l'Irak. Mitterrand fit ces choix par pure realpolitik. Il lui était évident que l'Irak n'était pas de taille face aux Etats-Unis et que la vieille stratégie Gaulliste n'avait plus de sens maintenant que la guerre froide était finie et que l'Union Soviétique se désagrégeait. Pour servir l'intérêt national de la France, il n'était plus question de défier l'Amérique mais d'être parmi les gagnants et ainsi avoir son mot à dire dans le règlement final, quel qu'il puisse être.

Presque douze ans plus tard, peu a changé à cet égard. Malgré toute sa rhétorique anti-américaine, la France a activement soutenu les efforts militaires des Etats-Unis sur tous les fronts au long des années 90, que ce soit en Bosnie, dans Kosovo, ou en Afghanistan. Le raisonnement est de toujours essayer d'apparaître comme un pair de la seule et unique  superpuissance, traitant d'égal à égal avec elle -- et au passage de rester en contact avec la technologie et l'entraînement militaire toujours plus performant de la superpuissance.

Concernant l'Irak, la France est maintenant confrontée à une situation ironique : l'Irak fut écrasé en 1991, comme Mitterrand l'avait prévu, mais George Bush et ensuite Bill Clinton laissèrent Saddam survivre. La seule attitude raisonnable pour les Français était de garder leur distance.

Maintenant qu'un nouveau président américain, George W. Bush, semble vouloir sérieusement se débarrasser de la dictature Baathiste, les choses pourraient changer à nouveau. La France aussi a un nouveau président -- le même Jacques Chirac qui a aidé Pompidou et Giscard à cimenter les relations franco-irakiennes dans les années 70. L'opinion publique française est indiscutablement plus pro-Irak ou neutraliste que jamais, ne fût-ce qu'en raison de la population musulmane croissante de la France. Mais la propre position de Chirac est plus subtile. Ces derniers mois, il a exprimé de manière répétée ses  inquiétudes concernant "une guerre préventive" contre l'Irak "non autorisée" par les Nations Unies ou la communauté internationale.

En outre, contrairement au chancelier allemand neutraliste, Gerhard Schröder, il n'a pas exclu la guerre en tant que telle. Cela aurait été l'équivalent de se mettre soi-même hors-jeu, et la France doit être une grande puissance à n'importe quel prix.

Auteur de plusieurs livres sur les relations internationales, Michel Gurfinkiel est rédacteur en chef de Valeurs Actuelles, un hebdomadaire parisien.

 


 
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