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De Gaulle
 
 

CE QUE JE N’AI PAS DIT
Par Le général JOUHAUD
Chez Fayard

L’AFFAIRE SI SALAH

P.149 à 152

L'affaire Si Salah fournirait, s'il en était besoin, la démonstration de la volonté du président de la République de traiter avec le seul G.P.R.A. pour négocier avec lui l'indépendance de l'Algérie, à l'exclusion de toute autre solution.

Cet épisode fut malheureusement peu ébruité à l'époque, mais on connaît aujourd'hui l'essentiel des tractations qui ont eu lieu entre les autorités françaises et les chefs de la wilaya 4.

Résumons-les :

Le 17 mars I960, le colonel Si Salah, par l'intermédiaire du cadi de Médéa, s'informe auprès du gouvernement français des conditions d'un éventuel  « cessez-le-feu ».

C'est une réponse positive à la « paix des braves » offerte par De Gaulle.

Comment Si Salah, ce guerrier coura­geux, qui l'année précédente avait participé à la répression sanglante de sa zone, que menaçait la démoralisation de certains chefs, en était-il arrivé, à son tour, à vouloir déposer les armes ?

Comme ses adjoints et ses hommes, les « djounouds », il se rend compte de la vanité des buts que poursuivent, à l'extérieur, les chefs rebelles. L'amertume dans les djebels est grande. Les coups portés par l'armée française ont réduit le potentiel militaire des « hors-la-loi ». Les cadres qui combattent se sentent abandonnés par les politiques de Tunis, qui paraissent dominés par leurs ambitions. Le soutien logistique ne franchit plus les frontières. La population musulmane ne ravitaille plus les maquis, renseigne même les forces françaises.

Que faire, sinon reconnaître l'inanité de la lutte ? Il faut donc traiter, mais dans l'honneur. Il ne s'agit pas de tourner les fusils contre les frères d'armes, comme l'a fait Bellounis, mais au contraire il faut rallier le maximum de wilayas à seule fin d'arrêter un combat sans issue et de participer à la construction généreuse d'une Algérie nouvelle, fraternelle, telle que semble l'envisager De Gaulle.

C'est donc à ce dernier que s'adresse Si Salah pour engager des négociations.

Le général De Gaulle ne peut balayer d'un revers de main les propositions de la wilaya 4. Il peut toutefois les faire avorter. L'action qu'il mènera se traduira par un échec, dû à une maladresse insigne ou à une volonté délibérée de ne pas aboutir.

Qu'on en juge.

Les rebelles veulent donc traiter directement avec De Gaulle, qui désigne, pour engager les contacts, le colonel Mathon, du cabinet de Debré, et son homme de confiance, Bernard Tricot. Je ne saurais douter de la probité intellectuelle de ce dernier. Mais, pour profiter de la rupture entre les organisations intérieure et extérieure rebelles, la désignation de ce grand commis de l'État était-elle vraiment opportune ?

C'est un technocrate qui, dans la solitude de son bureau élyséen, ne croit qu'à l'émancipation de l'Algérie. Les seuls interlocuteurs valables, à ses yeux, sont les dirigeants de Tunis. Aussi lorsque, dira-t-il, intervient « cette affaire extraordinaire : toute une wilaya, semble-t-il, veut négocier pour un cessez-le-feu partiel », il est sceptique, car ce n'était pas du tout dans ses projets. Pour lui, l'essentiel est la négociation avec le F.L.N.

Il faut tout de même discuter avec Si Salah, car, « dans la mesure où il y aurait eu avec la wilaya 4 des négociations qui auraient avancé, qui auraient donné au G.P.R.A. le sentiment qu'il fallait mettre fin au conflit parce que ses troupes ne suivaient pas, ce devait être un adjuvant pour ces négociations avec le F.L.N. ». (Laurent theiss, Philippe ratte, op. cit)

Ainsi, pour Bernard Tricot, la négociation politique et la reddition militaire sont liées : une reddition militaire obtenue sans consultation du G.P.R.A. ne risquerait-elle pas de faire échouer l'accord à conclure avec le F.L.N. ?

Or. pour l'Elysée, cet accord est indispensable à la paix en Algérie.

A Tunis, le G.P.R.A. ne peut s'éloigner de deux impératifs : préserver l'autorité de l'exécutif et ne rien concéder à la paix sans que l'avenir politique ne soit au préalable assuré. La menace que pourra faire planer le gouvernement français, avec la « paix des braves », incitera Tunis à reprendre ses chefs en main pour déjouer la reddition. On n'ignore pas à Paris le sang qui coule lors de chaque purge. C'est une grave menace pour les chefs de la wilaya 4, dont l'Elysée ne tiendra pas compte.

Le 10 juin 1960, le président de la République reçoit, à l'Elysée, trois chefs rebelles. Qui sont-ils ? Si Salah, le chef de la wilaya 4, le commandant Mohammed, un « dur » qui s'est distingué par sa cruauté dans les purges antérieures, et le responsable politique Lakhdar. Entre temps, ces trois hommes ont pris des contacts avec d'autres chefs de wilayas. Ils tiennent pour certain que les armes seront déposées dans une région allant de l'Ouarsenis à la Grande Kabylie et de la côte à l'Atlas saharien. La contagion gagnant, sans doute peut-on espérer assurer la paix dans toute l'Oranie, l'Algérois et la Grande Kabylie.

L'opération est inespérée. Que se dirent De Gaulle et ses visiteurs ? On l'ignore, mais on sait que le chef de l'État reçut ses interlocuteurs avec hauteur ; il refusera même de leur serrer la main à la fin de l'entretien. Ce n'est pas dans les traditions françaises. Lorsque Abdel-Kader fit sa soumission, les honneurs militaires lui furent rendus par le colonel de Montauban. Il était d'usage dans l'armée d'Afrique de saluer le courage des vaincus. L'attitude de De Gaulle froissa Si Salah. En outre, ce dernier, qui ne veut pas passer pour un traître, demande à s'entretenir avec un chef historique, Ben Bella, pour le mettre au courant de la situation critique des wilayas et de l'impossibilité de continuer la lutte à l'intérieur de l'Algérie. Obtenir l'aval de Ben Bella est pour lui indispensable sur le plan moral ; cet accord enlèvera tout scrupule aux chefs des wilayas qui seraient encore hésitants. L'autorisation de se rendre au château d'Aulnoye lui est pourtant refusée.

Le 14 juin, De Gaulle, dans une allocution télévisée, se tourne vers les dirigeants de l'insurrection. Il leur déclare les attendre « pour trouver avec eux une fin honorable aux combats qui traînent encore, régler la destination des armes, assurer le sort des combattants. Après quoi, tout sera fait pour que le peuple algérien ait la parole dans l'apaisement. La décision ne sera que la sienne »...

Ce discours sonne comme un glas au cœur des chefs de la wilaya 4. Que vont répondre, aujourd'hui, à leurs sollicitations les autres rebelles puisque c'est avec Tunis que De Gaulle a décidé de traiter ? Se sentiront-ils le droit de compromettre les négociations politico-militaires entre les gouvernements français et algérien ? S'ils persistent dans leurs intentions, n'auront-ils pas trahi la cause qu'ils défendent ? L'erreur tactique de De Gaulle, si toutefois elle n'a pas été volontaire, lui fera perdre la partie tant auprès du G.P.R.A. que des chefs luttant à l'intérieur de l'Algérie.

Pour le président de la République, ce ralliement de wilayas entrait dans le cadre de ces « péripéties » qui n'étaient pas de nature à résoudre le problème, du moins tel qu'il le concevait. Si Salah et le capitaine Lakhdar paieront de leur vie leur initiative. Le commandant Mohammed, ayant compris que l'opération projetée ne pouvait plus qu'échouer, n'hésita pas à châtier ses anciens compagnons.

Jamais la France n'était passée aussi près de la victoire.

Supposons un instant que l'initiative prise par Si Salah ait été couronnée de succès. Le cessez-le-feu serait intervenu dans la plus grande partie, sinon dans la totalité de l'Algérie.

De Gaulle aurait-il encore pu parler d'indépendance, traiter avec le G.P.R.A. ?

Comment concilier cette politique avec l'humiliation que subirait l'armée, mise en demeure de brader un territoire français, alors que l'ennemi venait de capituler ?

C'est pourquoi De Gaulle ne pouvait, en raison des buts politiques poursuivis, accepter les propositions de soumission de Si Salah.

Des succès non décisifs de nos troupes lui suffisaient pour modérer tout complexe de supériorité de nos soldats et pour le faire apparaître, aux yeux de l'histoire, comme le souverain magnanime, accordant généreusement l'indépendance à des sujets révoltés.

« L'ex-général De Gaulle de Londres » restait peut-être également persuadé de la légitimité des gouvernements en exil qui, seuls, représentaient valablement leurs compatriotes. C'était avec les responsables de l'extérieur qu'il fallait traiter.

C'est pourquoi Si Salah, en s'adressant à De Gaulle, avait signé son arrêt de mort.

Général JOUHAUD


 


 
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