Page Précédente
 
Translate
 
Menu des Plaintes
Cimetière
Forums
 
De Gaulle
 
 

VIE DE BASTIEN-THIRY
Extrait tiré du livre : ALGERIE FRANCAISE 1942-1962 par Philippe HEDUY
édité par la Société de Production Littéraire


Jean Bastien-Thiry est mort fusillé le 11 mars 1963, à 6 h 39 du matin. Il avait trente-cinq ans. « Nous avons la chance de pouvoir réfléchir, d’avoir du temps devant nous », disait-il dans la prison de la Santé.
C’était un Lorrain né à Lunéville, le 10 octobre 1927. Il était l’aîné des trois enfants d’un premier mariage de son père. Un officier d’artillerie. Hubert est son cadet. La plus jeune s’appelle Françoise.
Leur mère meurt à la naissance de Françoise. Jean avait alors trois ans. Son père se remarie. De ce second mariage, naissent un fils et trois filles.
Des sept enfants de M. Bastien-Thiry. Jean est le plus rare et le plus secret.. Il sera polytechnicien. Comme son père, il saura toujours ce qu’il veut, sans jamais faire supporter aux autres ce qu’il aura décidé pour lui-même. S’il est vraiment intransigeant vis-à-vis de lui, il ne l’est pas avec autrui. S’il a le sentiment de sa valeur, il a d’abord le sentiment de la liberté.

C’est un élève brillant, premier en mathématiques, premier en français, premier en histoire : il aime l’histoire. Il travaille facilement et régulièrement. Mais il ne fait jamais état de sa supériorité intellectuelle. Il n’a jamais un mot de reproche pour son frère Hubert, qui ne la quitte pas.
Ensemble, ils feront leurs premières études. A Metz, à Baccarat, puis à Lunéville. Jean obtient ses deux baccalauréats avec mention.
C’est l’année 1944, l’arrivée d’une nouvelle génération, qui refera ou défera une France où, à son tour, elle devra prendre des responsabilités suprêmes. Seul. Sa solitude sera sa grandeur.

Ensemble, pendant les années de guerre et d’occupation. Jean et son frère Hubert ont été scouts de France. Cette vie les marque. Ils seront tous deux officiers. Et Jean, en 1944, fait partie des équipes secouristes de la Croix Rouge. Une médaille le récompensera, à la libération de Lunéville. Plus tard, une autre décoration lui sera décernée pour services rendus à la France : La Légion d’Honneur. Il ne l’arrachera pas de sa poitrine, comme d’autres avant lui devant les tribunaux, lors de son jugement.

1945. La carrière est droite. La France va forger, puis tenir un ingénieur exceptionnel. Une année d’Hypotaupe à Nancy, deux années de taupe à Sainte Geneviève, et, en 1947, Jean Bastien-Thiry est reçu à l’X. Il fera d’abord son service militaire : Draguignan, Poitiers, Idar Oberstein, en Allemagne. La carrière continue, droite : deux années de Polytechnique, 1948-1950, deux années à l’Ecole Supérieure de l’Aéronautique, 1950-1952.

En 1952, l’ingénieur militaire Bastien-Thiry part pour Colomb-Béchar : le désert et les mathématiques, et aussi la fraternité militaire. Il pilote. Il survole l’Algérie.
Il retournera souvent à Béchar. Il est aussi à Brétigny , au centre d’essai en vol, et au terrain de l’Île du Levant. Il met au point des engins que le monde entier nous enviera, particulièrement les célèbres SS 10 et SS 11. Mais il ne s’en vantera jamais. Ses proches n’apprendront qu’au procès, à travers les dépositions de ses camarades ingénieurs, que sa valeur scientifique était internationale. Il se rendra plusieurs fois à l’étranger, notamment en Amérique, accueilli dans le monde fermé des fusées et des engins téléguidés.

Alors, en lui, des tempêtes extérieures vont troubler ce monde parfait où les flèches filent mathématiquement dans l’espace. Il se bat toujours pour ses engins, parce qu’il croit en eux et que lorsqu’il croit en quelque chose, il va jusqu’au bout.
Quelque chose, cependant, est changé. Ses préoccupations majeures ne sont plus scientifiques. Le feu qui a éclaté au Maroc, qu’il connaît et en Algérie, le brûle. Ce feu le consumera jusqu’à la fin.

C’était au Maroc qu’il fit la connaissance de Geneviève Lamirand ; chez des cousins. Il l’épouse en février 1955. Elle est comme lui, d’un abord doux et paisible, souriant. Mais comme lui, elle est en acier. Elle le montrera jusqu’à la fin, et après la fin.
Elle lui donne trois filles, Hélène en novembre 1955, Odile le 21 mars 1957, Agnès en 1960. Il les aime plus que tout, plus que tout jusqu’à la frontière secrète où Jean Bastien-Thiry n’appartient plus qu’à ses idées.
Le 8 janvier 1961, jour du référendum d’approbation de la politique gaulliste en Algérie, commence vraiment pour Jean Bastien-Thiry le chemin qui le conduira un an et demi plus tard sur la route du Petit-Clamart.
Avant, il se taira. Au ministère de l’Air, où il travaille, il ne parlera pas. Mais ses camarades se taisent lorsqu’ils sont en discussion politique et qu’il entre ; on sait ce qu’il pense, s’il ne l’exprime pas.
Il reste le même, toujours calme et paisible, et toujours souriant, avant, pendant et après : entre le 22 août, jour de l’attentat, et le 17 septembre, jour de son arrestation.
Ce jour était un samedi. Mme Bastien-Thiry voulait aller faire son marché à Bourg-La-Reine. Jean gardera les enfants. Tôt le matin, il sort. Il n’est pas rasé, il n’a même pas mis de cravate. Il conduit simplement la voiture au garage, car il a une petite réparation à faire et il revient tout de suite. Il n’est jamais revenu.
-Pourquoi n’a-t-il pas gagné l’étranger ? Pourquoi n’est-il pas, par exemple, resté en Angleterre, alors qu’il se trouvait officiellement à Farnborough, entre l’attentat et l’arrestation ?
-C’est simple, a répondu Mme Bastien-Thiry, parce qu’il estimait que son devoir était de ne pas fuir.


 
- Comite Veritas
- Alger 26 Mars 1962
- Ravin Rouge - Le Film
- le site des Bônois
- Pied-Noirs Aujourd'hui
- Association-Mostaganem
- Armand-Belvisi
- Bivouac-Legion.com
- Jean-Paul Gavino
- Le site du Clos-Salembier
- Mauvaise Graine
- Les Souffrances Secrètes
- Tenes Algerie
- Annuaire web africain
- http://mascara.p-rubira.com
- ADIMAD
- Site de Jaques Vassieux
- http://www.enfant-du-soleil.com
- Cercle algérianiste de Montpellier
- Pointe Pescade
- Jean-Pax Meffret
- Les tournants Rovigo
- l'Echo-Chons Patriotes
- Jocelyne Mas
- Coalition Harkis
- Le coin du popodoran
- http://oran1962.free.fr
- MIGDAL
- Ass. victimes du 26 Mars 1962
- Les Raisons de la colère
- Alger-Roi.fr
- Croisitour
- Dessins de Konk
- Secours de France
- Oran Cite des Jardins
- Pied noir,rapatrié

- http://coordination.cnfa.free.fr
- http://www.harkis.info
- http://www.salan.asso.fr


Copyright © 2000 - 2015 Algérie-Francaise.Org
All rights reserved. Tous droits réservés. Reproduction interdite sans la permission écrite de l'auteur.