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La Cendre Et  La Braise
Le réseau OAS- Est  - En Métropole 1961 - 1962
de Gérard LEHMANN
Editions SDE
147-149, rue Saint Honoré 75001 Paris

Partie 1

Chapitre II
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Naissance de l’O.A.S Métro -
(juin-septembre 1961)

P.82-à-84  89à-99-
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Lorsque le capitaine Sergent parvient clandestinement à Paris, au début du mois de juin 1961, un peu plus d'un mois après l'échec du putsch (26 avril), et que le lieutenant Godot le rejoint peu après, il a fait un  choix: celui de franchir la Méditerranée et de porter en métropole le combat de l'O AS.
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Le choix de Pierre Sergent s'appuie sur un acte de foi :
Si les Français sont hostiles à notre cause, c’est qu'ils ne la connaissent pas. S'ils font confiance au pouvoir, c’est qu’on les trompe. S'ils sont indifférents, c’est qu’on leur cache la nature du drame qui se déroule ici. On a beau me répéter qu'ils sont lâches, veules, injustes, préoccupés de leurs intérêts immédiats, je refuse de le croire. Le passé de la France parle en faveur des Français. Ils ne sont ni indifférents, ni injustes, ni lâches. Comme tous les hommes, ils ont besoin de foi et d'espérance.
(Pierre
Sergent: La bataille, p. 49).
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A chacune des régions militaires correspond un état-major de commandement articulé sur le même modèle qu'en Algérie: A.RP,/ O.M./ O.R.O. Le lieutenant Godot est en charge de l'O.M. sur le plan national. À Paris l'A. P. P. réunit Laurent Laudenbach, fondateur des éditions de La Table ronde ainsi qu'un groupe d'intellectuels de droite

autour de deux publications, La Lettre Armée-Nation confidentielle sinon clandestine, et surtout L'Esprit Public. On y retrouve Raoul Girardet, Jules Monnerot, Marcel Kalflèche, Jean Mabire, André Brissaud, Philippe Héduy, Hubert Bassot, Roger Nimier, Jacques Laurent et Jacques Perret.

Gignac, secrétaire général de l'Association des Combattants de l'Union Française, assure la liaison avec le général Salan. En province, le professeur Jean Reimbold dans le Sud-Est, Horace Savelli dans l'Ouest organise de vastes réseaux. Les premiers plasticages ont lieu en juin et juillet.

L'organigramme Godard, baptisé du nom de son créateur, a été réaménagé par le capitaine Curutchet en fonction d'un but, non pas défensif, de résistance, mais d'offensive révolutionnaire. Comme il s'en explique dans son ouvrage, Je veux la tourmente, c'est ce qui arrive quand l'O.R.O. prend le pas sur l'O.M. Or pour lui, il faut que les trois branches servent un plan insurrectionnel en trois phases : préparation, exécution, installation.
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Dans son avertissement au lecteur, Pierre Nora remarque l’absence dans les documents de noms comme ceux de Château-Jobert en Algérie et André Canal en métropole ainsi que le petit nombre de documents concernant Bidault et Soustelle ; enfin les documents ne présentent qu’une O.A.S. partielle de cadres en majorité militaires.
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Il reste que le but des partisans de l’Algérie française et de l’O.A.S. était avant tout patriotique. Pressés par le terrorisme aveugle du F.L.N., acculés par un gaullisme qu'ils avaient imprudemment promu — que n'avaient-ils été davantage politiques le 13 mai! — ils se sont vus comme des Résistants. Si le rejeu a été pour leurs adversaires une habileté dialectique payante, pour eux la Résistance était un sentiment. Les souvenirs de la Première Armée française, le passé résistant de nombre d’entre eux n'ont pas été pour rien dans ce sentiment. Car c'est cela, la mémoire: une représentation, non la conformité avec une vérité historique. Essentiellement, la mémoire est synchronique, elle est processus mental d'identification. Elle est un droit moral.

Cette période est donc marquée par une divergence entre, d'une part, le Directoire de Madrid et son bras armé en métropole représenté par Marcel Bouyer et ses réseaux, et d'autre part l’O.A.S.-métro du capitaine Sergent et l'Organisation algérienne dirigée par Raoul Salan, et sans préjudice de tous les groupes qui agissent au nom de l’O.A.S. mais indépendamment de toute hiérarchie sur le plan national. Cette divergence tient essentiellement au choix d'une stratégie: le Directoire madrilène veut rassembler autour de lui l'ensemble des forces vives de l’O.A.S. constituer une instance nationale de caractère gouvernemental en exil axée sur un projet politique défini.

Une opportunité de régler le contentieux se présente cependant sous les traits de Maurice Gingembre, à qui ses fonctions dans une importante société minière en Algérie permet de fréquents aller retour entre l'Algérie et la métropole, ce qui lui permet d'assurer la liaison entre Alger, Paris et Madrid et de jouer le rôle de médiateur.                       
II dispose en outre de moyens financiers conséquents. Le procès-verbal de son interrogatoire, dont O.A.S. parle présente des passages, est très révélateur des difficultés d'organisation de l'O.A.S. (op. cit.Document no. 18, p. 79-91).

L'offensive (septembre-novembre 1961)

Le 2 septembre 1961, le général Salan, sorti de sa réserve, officialise l'existence de l'O.A.S. Algérie-Sahara et de l’O.A.S. métropole. Il nomme à Paris une direction bicéphale civile/militaire. Le délégué civil est un haut fonctionnaire du ministère des Finances, André Regard, qui se cache sous le pseudonyme de Raphaël. Le délégué militaire est un général en activité qui se cache sous le pseudonyme de Verdun. Le capitaine Sergent se trouve donc coiffé par cette direction.

Au cours du mois de septembre, deux événements placent l'Organisation métropolitaine sous les projecteurs de l'actualité: l'attentat de Pont-sur-Seine et une vague d'arrestations.

Le 8 septembre, un attentat est organisé à Pont-sur-Seine contre De Gaulle en route pour Colombey. Il échoue. Il est monté par un petit groupe qui agit indépendamment de l’O.A.S., le C.N.R.L (Conseil National de la Résistance Intérieure).

À l'intérieur de l'Organisation, les opinions sur l'opportunité de l'élimination violente du chef de l'Etat sont divisées. Salan se défend énergiquement d'y avoir la moindre part. Dans une lettre adressée au Monde et publiée le 12 septembre 1961, il précise:
Des Français égarés furent pendant l'occupation allemande frappés dans leur vie et dans leurs biens, mais en aucun cas la Résistance ne s'est arrogée le droit d'exécuter un attentat contre le chef de l'Etat que la France s'était alors donné. Comme le Maréchal Pétain, le général De Gaulle fut investi par la volonté et la confiance nationales. II devra rendre compte de sa mission devant le peuple de France (Rémi Kauffer, op. cit. p. 123).

En revanche Susini pense avec raison qu'une exécution serait l'acte libérateur par excellence de la vie politique  et il n'est pas le seul. Le colonel Yves Godard, ancien résistant du Vercors et chargé de la Sécurité nationale à Alger de mai 1958 à février 1960, avant de passer à l'O.A.S., médite un projet similaire avec le colonel Fourcaud (lui-même l’un des fondateur du B.C.R.A. de Londres) et Claude Dumont (ancien collaborateur de Godard à Alger).
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II y aura d'autres tentatives d'élimination physique de De Gaulle, dont on peut penser que certains attentats ont été, sinon organisés, du moins suivis par des polices parallèles et désamorcés au dernier moment. On peut dire de ce premier attentat qu'il place le gouvernement espagnol dans une position difficile devant la France : le groupe madrilène ne bénéficiera plus de la bienveillance initiale dont il avait profité au début de son séjour en Espagne.

Au début septembre, toujours, un coup sévère est porté à l'Organisation : plusieurs membres du réseau de Marcel Bouyer sont arrêtés dont le fils du colonel Lacheroy, Nicolas Kayanakis et Georges
Caunes. Deux jours plus tard, c'est le tour de Maurice Gingembre, le directeur de la société Djebel Onck. Chargé d'un abondant courrier saisi, il est en relation avec beaucoup, sait beaucoup, parle beaucoup. Une vague d'arrestations s'ensuivent: les généraux Vanuxem et Crèvecœur, Raoul Girardet, Yves Alquier, l'auteur de Nous avons pacifié Taxait, André Brissaud, le colonel Hervé de Blignières et quelques autres.

L'O.A.S. est atteinte mais non décapitée: ni Gignac, ni Sergent ne sont arrêtés. Échappe également aux filets de la police André Regard, haut fonctionnaire du ministère des Finances, délégué civil de Salan à l'O.A.S.-métro qui est très proche de Michel Poniatowski et de Valéry Giscard d'Estaing.  Le réseau Résurrection-Patrie, démantelé, est reconstitué avec le médecin toulousain Jean Cassaigneau, le capitaine Bertrand de Gorostarzu et Robert Lalfert.
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Pierre Dautrive raconte :
[...] C'est moi qui ai monté de A jusqu'à Z les premiers groupes parisiens de lJO.A.S.-métro. [...] En tout mes groupes comprenaient environ cent personnes. Des étudiants, quelques employés ou même des ouvriers originaires d'Algérie. Ils me connaissaient sous des noms de code très divers [...].

Comment se faisaient les contacts ? Essentiellement dans les lieux publics. Rarement dans des appartements privés. Mon agent de liaison personnel, un tourneur pied-noir, vérifiait préalablement si le café ou le lieu de rendez-vous était « propre ». Il prenait alors contact avec la personne que je devais rencontrer et l’entraînait jusqu'à ma voiture garée dans une rue parallèle. Nous démarrions alors. C'est en roulant que la discussion avait lieu. C'était plus prudent [...].
En six mois, j'ai organisé avec l'aide d'Aubry (pseudonyme), entre 300 et 400 plasticages. Nous récupérions l'explosif sur des chantiers, grâce à des sympathisants.  
Les objectifs nous étaient fournis par l'Etat-major de l’O.A.S.-métro. C'est justement Aubry qui assurait la liaison avec lui. Quand je sa­vais qui frapper, j'envoyais un militant repérer l'endroit à plastiquer. Nous remettions alors les coordonnées de l'objectif à une de nos équipes « action ». Chacune d’entre elles comprenait deux membres. Un poseur de plastic et un guetteur…(Remi-Kauffer.op. cit.p.177)
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Le projet de l’O.A.S., en cet automne, est d'affirmer sa présence en métropole par des plasticages, mais aussi d'expliquer, de justifier son action, et ce faisant, de faire reconnaître sa légitimité. Le capitaine Jean-Marie Curutchet qui a déserté, rejoint l'O.A.S.; sous sa direction, l’O.R.O. prendra un nouveau départ. Si des plasticages sont opérés conjointement sur l'ensemble du territoire national à trois reprises, le capitaine Sergent pense qu'il faut arrêter. Mais ses ordres ne sont pas suivis d'effet et les plasticages continuent: le 17 novembre, le drugstore des Champs-Elysées est soufflé par une forte explosion.
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Autre événement qui marque ce mois de novembre: le Comité de Vincennes, qui réunit des personnalités favorables à l’O.A.S., dont certains députés qui ont voté en faveur de l'amendement Valentin, réunissent le 16 novembre trois mille personnes à la salle de La Mutualité dans le Ve arrondissement. Parmi eux, Jean Dides, conseiller municipal de Paris, qui a créé sous l'égide du C.N.R.I. (déjà évoqué) un réseau d'information dans la police ; on y trouve Jean-Baptiste Biaggi, Léon Delbecque, deux acteurs significatifs du 13 mai 1958. La réunion, au cours de laquelle, comme l'écrit Le Monde, le nom de Salan et l’O.A.S. sont acclamés, cause un énorme scandale sanctionné par la dissolution du Comité de Vincennes. Ainsi disparaît la seule plate-forme politique de l’O.A.S. en métropole.

L'apogée: début décembre 1961 - février 1962

Début décembre arrive d'Algérie André Canal dont on ne connaît alors que le nom de code Le Monocle. Il est chargé d'un ordre de mission par Salan. Le nom de code est Mission-III. Le noyau du groupe action est constitué de Philippe Castille, ancien tireur d'élite du S.D.C.E. et du pied-noir Jean-Marie Vincent. D'autre part, André Regard, Raphaël, est le délégué général civil choisi par Salan pour les questions politiques. Le général Salan espère beaucoup d'André Regard et de ses relations avec Valéry Giscard d'Estaing et Michel Poniatowski. En réalité, la direction de L’O.A.S. est remarquablement informée de ce qui se passe à l'échelon gouvernemental le plus élevé et notamment des débats du Conseil des ministres. 

Le groupe qui prendra quelques mois plus tard le nom de C.N.R.I. subsiste toujours. On y trouve Jacques Roy, un officier de marine et La Tour du Pin qui établit la liaison avec Georges Bidault. Avec Jean Dides, Roy organise un réseau d'informateurs dans la Marine, à la D.S.T., parmi les hauts fonctionnaires: aucun d'entre eux ne sera jamais inquiété par les autorités gouvernemental.

De son côté, Godot, qui a réussi à intégrer un groupe dirigé par le capitaine Baille (Casque d'or) : L’O.A.R. (voir pour plus de détail Jean-Marie Curutchet: Je veux la tourmente Paris Robert Laffont 1973, pp. 46-50), forme une équipe action sous le commandement de l'adjudant Robin.

Si la direction de L’O.A.S. métropolitaine est ainsi émiettée, l'accord ne se fera pas davantage sur la nature des opérations à mener. Pour le Monocle il s'agit de plastiquer ; Jean-Marie Curutchet, qui a remplacé le colonel Buchoud à la tête de L’O.R.O., préfère des opérations plus radicales. Il y aura donc rivalité entre l'O.R.O. et Mission-III.

Début 1962, les objectifs de l'O.R.O. sont prioritairement le Parti Communiste et le F.L.N.

Le procès-verbal d'interrogatoire du capitaine Curuchtet (2 mars 1964) nous donne une idée de la stratégie de L’O.R.O. et des problèmes liés à son fonctionnement (O.A.S. parle, doc. No. 45, pp. 214-222).  
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Les opérations menées par l’O.R.O. sont de deux ordres ; soit elles visent un but politico-psychologique et elle concerne deux types d’objectifs (d’une part, attentats contre les locaux du P.C.F. à l’exclusion de tout autre parti ou organisation syndicale, d’autre part destruction mineures de moyens de communication, canaux, voies ferrées, P & T, lignes haute tension) ; soit elles concernent le F.L.N. et ses tribunaux :

Les opérations menées contre la Fédération de France du F.L.N. furent par contre de véritables opérations de guérilla, menées conjointement par la Police parisienne et les groupes de l'action de l’O.R.O. J'attire votre attention que les objectifs traités étaient, non pas des « cafés musulmans », comme l’écrivait une certaine presse, mais de pseudo-tribunaux installés par le F.L.N. en plein cœur de Paris. Ces « tribunaux » se substituaient sur le territoire français à la justice française et «jugeaient », torturaient, exécutaient des citoyens français (op. cit. p. 220).
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N’oublions pas qu’à l’automne 1961, la population pied-noir était toute entière acquise à l’O.A.S., que l’Armée, qui avait au début pensé que De Gaulle se trompait, car il n’avait strictement rien compris à la guerre subversive, voyait bien qu’il la trompait ; une proportion non négligeable des officiers, 20 % suivant la Sécurité Militaire (voir Paul Hénissart, Les combattants du crépuscule / La dernière année de l'Algérie française Paris Grasset 1970, traduit de l'américain sous le titre Wolves in thé city, pp. 216-217), était également favorable, à l'O.A.S. La guerre psychologique menée entre autres par Jean-Jacques Susini portait ses fruits. Edgard Morin s'était réfugié dans sa forteresse de Rocher Noir mais même là ne s'y sentait pas en sécurité. Il avait prudemment préparé un éventuel repli de son équipe sur un bateau de guerre français qui mouillait au large! Si l’on ne tient pas compte de l'armée et de la gendarmerie, Edgar Morin disposait, pour Alger, de 3000 C.R.S., dont les 2/3, recrutés sur place, semblaient peu sûrs. Morin se rendra à Paris pour y réclamer des renforts. Alexandre Sanguinetti, adjoint de Roger Frey, refuse les renforts et les retours en métropole des éléments peu sûrs ; son ministre de l'Intérieur le soutient : le gouvernement avait fait son choix. Sanguinetti, qui méritait sans doute son surnom de Monsieur Anti-O.A.S., dirigeait à Paris la lutte contre l’O.A.S. et craignait de renforcer la position de l’O.A.S. en métropole:
Constantin Melnik, collaborateur intime de Michel Debré pour ce qui touchait à la police  pensait que la décision de Frey et de Sanguinetti de conserver en France la réserve des C.R.S. n’était pas complètement insensée, notant cependant que pour le présent cette décision favorisait l'expansion de I’O.A.S. en Algérie (Paul Hénissart, op. cit. p. 226).

Le lot de consolation pour Morin sera l'envoi de barbouzes en Algérie, le M.P.C. de Bitterlin, couverture sacrifiée à l'avance des deux cents inspecteurs de Michel Hacq... Quant à la brigade anti-O.A.S. du commissaire Gratien, trop exposée, elle sera ramenée en France fin octobre. Ce qui n'empêchera pas un commando Delta de mitrailler Gratien et son adjoint Joubert dans un café : le premier sera tué, le second blessé.

Quant au P.C.E, Jean-Marie Curutchet fait une nette distinction entre les militants et leurs chefs. De la même manière que les attentats contre le P.C.E n'ont fait ni tués ni blessés, les attentats contre les voies de communication obéissent au souci de ne pas faire de victimes : car il ne s'agit pas de guérilla, c'est-à-dire d'atteinte au potentiel de l'adversaire, non de guerre civile, mais de guerre psychologique: La preuve avait été administrée que des groupes armés clandestins existaient dans la région parisienne, le pouvoir ne pouvait dégarnir cette région capitale des Forces de l'Ordre (O.A.S parle, p. 219). Il n'en est pas de même pour le F.L.N. : une dizaine d'opérations firent une trentaine de blessés et de tués. Le chef de l’O.R.O. précise que ces actions ont été menées avec la collaboration de la police et parfois avec celle d'éléments du M.N.A. :

La Police parisienne encore sous le choc de sa lutte contre le F.L.N., sachant par ailleurs que j'avais donné l'ordre écrit de démonter une opération plutôt que de mettre en danger la vie d'un policier en uniforme, déplorant enfin de ne plus rien pouvoir entreprendre par elle-même, collabora avec nous en nous fournissant tous les renseignements utiles sur ces « tribunaux ».

Il suffira à la section Opérations de prévenir à l'avance la police parisienne de l'endroit et de l'heure de l'expédition, de telle manière que tout risque de confrontation soit évité.

Mais il y a également d'autres opportunités pour l'OA.S. de manifester sa présence : vols d'armes, comme celui exécuté par le lieutenant Bernard le 12 décembre 1961, ou encore celui de Satory le 4 janvier 1962; désertions, (« mutations » dit-on ironiquement) rendues largement publiques dans la presse par des lettres explicatives. Celle du capitaine Glasser, commandeur de la Légion d'Honneur à trente-trois ans et gendre du général Gardy a le contenu suivant :
Officier de la Légion, je pense être sur la voie de l'honneur et de la fidé­lité. Fidélité au souvenir de l'Indochine, Fidélité à la révolution du 13 mai. Fidélité à l'Algérie nouvelle et fraternelle de 1958. Fidélité au serment de l’Armée. Fidélité à mes propres engagements.
[...] Par formation je ne suis pas un extrémiste, encore moins un fasciste.
Si l'Organisation Armée Secrète m avait paru extrémiste ou fasciste, je ne l’aurai pas rejointe.
[...] Peut-être un jour ma cravate de la Légion d'Honneur épinglée sur une porte de cellule, se balancera-t-elle aux courants d'air des prisons gaul­listes. Elle rappellera aux visiteurs que dans « Légion d'Honneur » il y a
« Honneur » ce que beaucoup semblent avoir oublié (cité dans Pierre Sergent, op. cit. p. 180).

Le capitaine Glasser sera le chef d'état-major de la Z.A.R (Zone Autonome de Paris)

À elle seule, la désertion du colonel Ch
âteau-Jobert, le fameux « Conan » de la Résistance, le quatrième Compagnon de la Libération à rejoindre l’O.A.S., a un retentissement considérable.

Vols d'armes et désertions ont deux effets : renforcer le potentiel de l'Organisation en armes et en hommes, manifester sa présence ; une présence que les nombreuses expéditions des peintres de la nuit qui multiplient leurs tags « O.A.S. veille/O.A.S. vaincra », les drapeaux de l'O A.S. hissés ça et là, et notamment sur une tour de Notre-Dame (voir Paul Henissart: op. cit., p. 214), ou encore les interviews donnés à la presse étrangère (dont celle de Pierre Sergent au Neue Illustrierte) renforcent. La distribution de bulletins d'information, de communiqués, de lettres ouvertes, de tracts fait aussi partie de l'arsenal.

Pierre Sergent précise que la décentralisation de l'appareil de l'Organisation sur l'ensemble du territoire sert à merveille ce genre d'activité à laquelle la presse légale accorde une large publicité.

II s'occupe également de la réorganisation de l’O.A.S.-métro, particulièrement dans le Sud-ouest. Outre l'équipe de Toulouse déjà mentionnée, et dont le responsable est le cardiologue Jean Cassaigneau, il y a celle de Bordeaux dont le responsable est Pierre Aurillac, dont les parents ont été torturés par la Gestapo, et qui autrefois était un proche collaborateur de Chaban-Delmas ; Morri, responsable régional de l'A.C.U.F. (Anciens Combattants de l'Union Française), deux avocats, Henri Boyreau et Etienne Ribeton, Claude Chapot, directeur des Forges modernes, en font partie. A Bayonne nous trouvons Jean Forgues et Bernard Gorostarzu. Ce dernier organise le 3 décembre 1961 l'évasion de Luc Céteaux, Nicolas Kayanakis et Jean Caunes détenus à la prison de Mont-de-Marsan. Les évadés seront accueillis à Paris par le capitaine Michel Glasser. Kayanakis prend alors la direction de l'O.M.J. (O.A.S.-métro jeunes), tandis que Caunes est chargé du secrétariat de l'A.P.P. La mission de la section est alors de prendre contact avec les intellectuels sympathisants et de diffuser une revue de presse pour l'état-major de l'O.A.S. à Alger. Appel aussi en direction de la police. Un tract daté du 11 janvier 1962, distribué par le réseau Honneur et Patrie de la Préfecture de police, rappelle que la police parisienne a fait naître l'insurrection d'août 44, manifesté le 17 mars 1958, combattu les traîtres pendant l'occupation, et lutté contre le F.L.N.

Quant à la Mission-III d'André Canal, un rapprochement s'opère avec O.A.S-métro (Mission-II) de Sergent, mais il ne débouche pas sur des résultats concrets. Le Monocle refuse de s'intégrer dans l’O.A.S.-métro et persiste dans sa stratégie. Dans la nuit du 17 au 18 janvier, dix-huit explosions retentissent à Paris et en banlieue.

Le 22 janvier, une charge explose au ministère des Affaires étrangères, fait un mort et douze blessés ; l'attentat n'est pas revendiqué et l'on saura plus tard, entre autres par Jacques Delarue, que la charge a explosé suite à une erreur de manipulation par des agents du S.D.E.C.E. Même chose à Issy-les-Moulineaux où une voiture piégée explose devant un local où se tient un rassemblement pour la paix en Algérie et qui fait de nombreuses victimes. Là encore, et même si la procédure employée diverge de celle employée habituellement par l’O.A.S., et même si l'on peut se demander s'il ne s'agit pas d'une provocation policière, c'est l'Organisation qui porte le chapeau. Je suis l'un des rares à savoir la vérité aujourd'hui. .

Le 23 janvier, neuf plasticages visent des élus communistes, le 24, vague de treize explosions. Nouvelle vague encore contre des personnalités : les professeurs Maurice Duverger, Roger Pinto, le journaliste Serge Bromberger et le membre du bureau politique du P.C.F. Raymond Guyot. Le 2 février un attentat malheureux au domicile d'André Malraux blesse la fille du concierge de l'immeuble. L'émotion populaire est considérable : elle débouchera sur la manifestation de Charonne.

A la veille de la signature des Accords d'Evian, Pierre Sergent tente de maintenir des contacts avec le monde politique, mais sans parvenir à établir une plate-forme politique convenable. La direction de l'O.A.S. cherche à s'opposer par une offensive généralisée au cessez-le-feu qui doit entrer en vigueur le 19 mars 1962.

Alors que Georges Bidault quitte la France, le colonel Antoine Argoud s'échappe de sa résidence surveillée aux Canaries et gagne l'Allemagne où sont cantonnés nombre d'officiers retour d'Algérie et partisans de l'Algérie française. Un rapport de Jacques Delarue (PJ.) sur la situation dans les garnisons françaises d'Allemagne Fédérale n'aura d'autre effet que de faire sanctionner les officiers coupables de lui avoir fourni ces renseignements et de s'être ainsi compromis avec le pouvoir gaulliste. Le message était clair.

L'irréversible (mars-juin 1962)

L'irréversible, c'est la signature des « Accords d'Évian » : En Algérie l’O.A.S. devra combattre sur deux fronts, celui du FLN et celui du gouvernement gaulliste. L'instruction no.29/O.A.S. du 23 février qui, selon le  mot de Pierre Sergent, a le caractère d'une véritable déclaration de guerre, concerne également l'OAS.-métro qui doit s'aligner sur l'Organisation en Algérie: il s'agit de paralyser le pouvoir et le mettre dans l'impossibilité d'exercer son autorité. Mais en outre, des facteurs supplémentaires doivent être pris en compte en métropole : Ils sont: essentiellement orientés vers la manœuvre politique qui ne manquera pas de se réveiller à la faveur de l'action en Algérie à partir du moment où elle apparaîtra clairement.

Au lendemain du référendum du 8 avril qui avalise le soutien à la politique gouvernementale, une note concernant la réorganisation de l'O.A.S.-métro adressée au capitaine Curutchet (O.A.S. parle, doc. No. 59, pp. 249-254) prend acte de l'échec politique que représente les 90 % qui approuvent en fait l'indépendance de l'Algérie sous la houlette du F.L.N., reconnaît la maladresse des opérations engagées, l'amateurisme des réseaux, déplore le manque de moyens et de discipline, affirme la nécessité d'une doctrine politique qui dépasse le simple maintien de l'Algérie dans la France. Le mythe de la guerre subversive doit être abandonné. En revanche, beaucoup est attendu de la création, en avril, d'un C.N.R. qui puisse consentir un effort délibéré de construction politique accompli, non pas en « vase clos » mais en collaboration avec les élites politiques, militaires, administratives, économiques, et étayée par un effort intense de propagande (p. 253) ;

Alors qu'en Algérie la violence se déchaîne avec les événements sanglants de Babel-Oued et de la rue d'Isly où des Français tombent sous des balles françaises, alors que les gendarmes mobiles du général Katz répriment dans le sang la révolte des pieds-noirs à Oran, que Debrosse sévit à Alger et qu'une tentative de constitution d'un maquis dans l'Ouarsenis (fief du bachaga Boualam) échoue, l'O.A.S.-métro est sur le déclin.

L'article 16 de la Constitution permet l’embastillement sans jugement d'un millier de partisans de l'Algérie française susceptibles d'activisme dans les camps de Thol et de Saint-Maurice-l'Ardoise. Godot a été arrêté. Jean Caunes, Christian Alba et Nicolas Kayanakis développent tout de même l’O.A.S.-métro-jeunes dans la capitale et Jean-Marc Kalflèche y organise un réseau d'étudiants pieds-noirs. L'ensemble, note Rémi Kauffer, totalise cinq cents personnes.

Et Mission-III poursuit ses plasticages.

Courant Avril, l'O.A.S. trouve en Belgique, refuges et appuis. À cette époque, on trouve dans le sillage de Pierre Sergent et d'André Canal des hommes comme le colonel Argoud, le sénateur Claude Dumont, ami de Soustelle et ancien résistant, André Regard, Jean-Marie Curutchet. Mais les arrestations se multiplient. À l'étranger, Georges Bidault, Antoine Argoud, Jacques Soustelle et Pierre Sergent forment le Comité exécutif du C.N.R.

Jetant un regard sur le passé, Pierre Sergent regrette qu'un organisme gouvernemental n'ait pas été créé au moment favorable, non pas au moment où le colonel Argoud le projetait, mais une fois bien assise la crédibilité de l’O.A.S. et avant l'effondrement d'avril. Sans doute alors que Georges Bidault et Jacques Soustelle y auraient trouvé naturellement leur place, et que leur exemple aurait entraîné l'adhésion d'autres

personnalités politiques. Trop tard!

Partie 2


 
- Comite Veritas
- Alger 26 Mars 1962
- Ravin Rouge - Le Film
- le site des Bônois
- Pied-Noirs Aujourd'hui
- Association-Mostaganem
- Armand-Belvisi
- Bivouac-Legion.com
- Jean-Paul Gavino
- Le site du Clos-Salembier
- Mauvaise Graine
- Les Souffrances Secrètes
- Tenes Algerie
- Annuaire web africain
- http://mascara.p-rubira.com
- ADIMAD
- Site de Jaques Vassieux
- http://www.enfant-du-soleil.com
- Cercle algérianiste de Montpellier
- Pointe Pescade
- Jean-Pax Meffret
- Les tournants Rovigo
- l'Echo-Chons Patriotes
- Jocelyne Mas
- Coalition Harkis
- Le coin du popodoran
- http://oran1962.free.fr
- MIGDAL
- Ass. victimes du 26 Mars 1962
- Les Raisons de la colère
- Alger-Roi.fr
- Croisitour
- Dessins de Konk
- Secours de France
- Oran Cite des Jardins
- Pied noir,rapatrié

- http://coordination.cnfa.free.fr
- http://www.harkis.info
- http://www.salan.asso.fr


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